L’état de la cavité buccale de la personne âgée est souvent altéré de part le
vieillissement physiologique et l’existence fréquente de pathologies associées.De plus, le retentissement des pathologies buccodentaires est important sur l’état de santé et la qualité de vie des personnes âgées (11-12-13).L’évolution démographique avec l’augmentation du nombre des personnes âgées à venir nous impose une prise en charge préventive et curative des soins bucco-dentaires en gériatrie. Cette prise en charge doit passer par une coordination multidisciplinaire accrue des soins en intégrant les chirurgien-dentistes et en facilitant la prévention par la sensibilisation et la formation du personnel soignant médical et paramédical.
vieillissement physiologique et l’existence fréquente de pathologies associées.De plus, le retentissement des pathologies buccodentaires est important sur l’état de santé et la qualité de vie des personnes âgées (11-12-13).L’évolution démographique avec l’augmentation du nombre des personnes âgées à venir nous impose une prise en charge préventive et curative des soins bucco-dentaires en gériatrie. Cette prise en charge doit passer par une coordination multidisciplinaire accrue des soins en intégrant les chirurgien-dentistes et en facilitant la prévention par la sensibilisation et la formation du personnel soignant médical et paramédical.
Les raisons le plus souvent invoquées par les soignants sont de deux ordres :
· un ordre « matériel », le manque de temps, classiquement allégué, et les difficultés techniques du geste lui-même : du fait de l’absence de visibilité
en particulier, et d’une mauvaise coopération de patients qui n’ouvrent pas la
bouche, peuvent mordre éventuellement ;
et des facteurs plus intimes, plus personnels, d’ordre affectif :
- · le dégoût, lié au délabrement de ces bouches, à la nécessaire proximité lors
du soin, l’aspect répugnant de dentiers non nettoyés, la présence de
sécrétions, d’odeurs, du réflexe nauséeux, d’éventuelles mycoses…
- · mais aussi le caractère perçu comme relativement « violent » du soin :
objet de désagrément, de non compréhension de la part de sujets confus ou
intellectuellement diminués, avec comme corrélat chez le soignant la peur de
faire mal à ces patients plaintifs, saignant facilement, dans un contexte de
corps à corps confinant parfois à la « bagarre ».
Toutes ces raisons peuvent à elles seules sembler suffisantes.Mais elles ne me semblent pas répondre à un certain nombre d’objections qu’il
va donc falloir essayer de lever autrement :
- - 1° objection : nombreux sont ceux qui en attestent : les réactions de
dégoût semblent moindres pour les toilettes intimes, les selles, peut-être
banalisées par l’expérience maternelle - et de plus en plus paternelle.
- - 2° objection : nous sommes régulièrement confrontés en médecine au
caractère parfois agressif de certains actes de soins, injections,
effractions ; bien à l’abri de nos techniques, nous ne pouvons ignorer la
position de savoir et de pouvoir qu’elles nous confèrent, et qu’illustre
notre situation « dominante » par rapport au patient alité ou étendu sur un
fauteuil ; il y a une part de sadisme dans toute vocation médicale ou
paramédicale, ne serait-ce que dans la certitude qui nous habite que le
malade, le mourant, c’est l’autre. Et ce ne sont certainement pas des
odontologues qui pourront me contredire : car combien de fois n’avonsnous pas entendu cette phrase : « sur un fauteuil de dentiste, on me ferait
avouer n’importe quoi ! »
- - 3° objection : nous sommes également accoutumés en gériatrie à cette
préfiguration de notre possible devenir que sont ces images de fin de vie :
décrépitude du corps, déchéance de l’esprit, dépendance, tout aussi
dérangeantes que ces bouches il est vrai délabrées, désertées de toute
dimension érotique, que ces dents déchaussées et qui tombent, qui
annoncent une mort dans les rêves, dit l’interprétation populaire ; souvent
nos soignants le soulignent : « on n’aura pas forcément un cancer ou une
rupture d’anévrysme, comme on en voit aussi dans les autres services ;
mais dans le meilleur des cas –si l’on peut dire- on vieillira et on mourra
comme eux » ; et notre pensée achoppe sur cette limite extrême où vient
buter l’intelligence humaine : le temps qui nous anéantit.
Alors pourquoi ? Pourquoi cette réticence ?
Sans prétendre en donner une interprétation péremptoire, mais bien plutôt des
propositions à vous soumettre, et des pistes de réflexion, je reprendrai
l’explication d’une de nos soignantes, qui pointait fort justement la présence du
regard au dessus de cette bouche, regard témoin du dégoût, regard qui ne
comprend pas et qui interroge ; regard qui « personnalise » aussi l’organe objet
de soin : « un derrière, dit une autre soignante, c’est anonyme, pas un visage ».
Regard qui souligne du coup le caractère voyeur et intrusif du soin :
« regard », au sens « plombier » du terme, sur cette cavité humide, « l’au-dedans » de l’autre
où nous pourrions nous perdre corps et biens, comme dans le « vagin denté » du mythe, et
sous le regard de l’autre, qui inscrit sans doute notre acte de soin dans son indécence.
BIBLIOGRAPHIE
Nadine Costéja, psychologue clinicienne
Centre de Gérontologie Clinique Antonin Balmès – CHU de Montpelllier
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